L'appartement de Felger

Le soleil se levait tout juste quand je sortais du garage de mon immeuble. La lumière était basse et pâle, un vrai temps d'automne. Le lecteur mp3 sur les oreilles, le casque de moto déjà enfilé, je cherchais juste la bonne chanson pour démarrer cette journée. Ca n'avait rien de prudent que d'écouter de la musique en roulant en bécane dans une ville monstre comme New-York mais délivrer des paquets toute la journée n'a rien de très jouissif en soi, alors un peu de folie par moments... Quelques accélérations dans les avenues, des slaloms, suivre une jolie fille au pas sur un pâté de maison, des petits plaisirs quotidiens... La musique en faisait partie.

*Trouvé : ce sera du Wax Taylor.*

Un coup d'oeil à mon portable me fit remarquer qu'il ne captait aucun réseau. Foutue ville surpeuplée. Au moins j'aurais eu une preuve au bureau en cas d'urgences. J'avais le temps de passer au Corner prendre un café et un bagel. La rue était déserte au moment de l'emprunter. Des voitures garées sur le bas côté, comme d'habitude. Mais tout de même...

*Je m'attendais à plus de circulation, ce matin.*

La veille avait été mon jour de repos hebdomadaire, vu que mon bureau travaillait le samedi. Une longue journée à l'appartement sans mettre le nez dehors, à jouer au dernier jeu de basket sorti. Je n'étais pas descendu au terrain du quartier pour y jouer avec les quelques amateurs qui s'y réunissaient toujours quotidiennement, ni même monté sur le toit de l'immeuble pour y faire des paniers en solitaire. Rien que moi et mon nombril, une journée en ermite.
Je bifurquais à gauche au carrefour pour reprendre l'axe routier principal. Les pulsations bourdonnaient à mes oreilles, sans toutefois pouvoir couvrir les vrombissements mécaniques. A peine avais-je braqué le guidon que je pilais net au milieu de la route, sans m'inquiéter de ce qui pourrait arriver de derrière. Aucune chance que qui que ce soit arrive, vu le bordel en face de moi.

Qu'est-ce que c'est que ce...

Les mots m'échappèrent tout seuls, à mesure que la panique m'envahissait. La rue était jonchée de carcasses de voitures empilées, encastrées, sorties de la route, fumantes et désertes. Des vélos, des sacs traînaient sur les trottoirs, eux-mêmes maculés de sang par endroits.

Je n'eus pas le loisir de savoir d'où provenaient les fumées qui embrumaient le bas de ma rue. Des bruits de pas se firent entendre dans le couloir et je ne gardais aucun souvenir de présence humaine depuis quarante huit heures. Je courus à travers mon salon en évitant mon encombrante moto. La moquette à cent dollars le mètre carré en avait déjà pris un coup... Oubliant ces pensées stupides, mon sang ne fit qu'un tour. Un nouveau sentiment de panique me prit et m'empêcha de me ruer sur la poignée pour ouvrir en grand à l'inconnu. Au moment de faire les derniers pas, je ralentis le rythme. Je souleva en silence le siège de la moto pour en tirer le démonte-pneu. La nervosité m'empêcha de rire de ma paranoïa... Si les terroristes se baladaient dans mon immeuble, pile à mon étage, c'est que je vivais vraiment une période de malchance! Ce qui expliquerait la mauvaise tournure de ma carrière. Voilà, c'était pas de ma faute...

* Concentre-toi, bordel!!! *

Je respira à fond pour me calmer. Un coup d'oeil à la porte m'apprit que ses deux serrures étaient enclenchées. Il me suffisait de jeter un regard par le judas pour espérer voir ce qui se passait dans le couloir.

[Hrp: j'ai fusionné ton ancien post avec celui-ci, ça ira comme ça]

En regardant par le judas, Felger disingue une silhouette tirant ce qui ressemble etre un corps d'enfant, en regardant mieux il se rend compte que le visage de celui debout est plein de sang, et que l'enfant est partiellement devoré...

En pleine panique Felger ne peut s'empecher d'hurler, ce qui attire la chose qui lache prise sur l'enfant et vient donner des coups sur la porte...

L'horreur me fit reculer instantanément. Hors de question que ce truc s'approche de moi! Je serrais le démonte-pneu encore plus fort, frissonnant en sentant tous mes poils se hérisser. J'avais une furieuse envie de vomir.

* Putain, c'est quoi ce truc, mais bordel c'est quoi ce truc? *

Tremblant comme une feuille au milieu du salon, j'aperçus mon téléphone portable sur la table du salon. Je me ruais dessus, l'allumait pour découvrir une absence totale de réseau. Mon estomac ne put retenir plus longtemps les bagels enfournés durant la journée et je régurgita le tout sur ma chère moquette. A bout de souffle, nauséeux, j'écoutai la chose dans le couloir qui continuait à donner des coups sur la porte. J'habitais au sixième étage et cette porte était ma seule sortie valable. Je rampais vers la cuisine avec ça à l'esprit. Je me relevais pour boire au robinet et ôter l'insupportable goût âcre de ma bouche. Mes couteaux de cuisine trônaient à côté de l'évier. Je pris le plus gros et le petit sans réfléchir, puis posais le tout sur le plan de travail, en y ajoutant le démonte-pneu. Il me fallait un plan. J'avais à manger pour quelques jours mais il me faudrait bien sortir à un moment ou à un autre. Mais tout d'abord, assurer ma sécurité. Je fermais la porte de la cuisine à clef. Les coups se firent moins entendre aussitôt. J'embrassais ma cuisine d'un regard, vis la fenêtre et l'immeuble d'en face, dans lequel tout paraissait calme et normal. La rue, elle, hébergeait le même bordel que partout. La nuit rendait le tout encore plus effrayant. J'étais exténué... Au bout de quelques minutes durant lesquelles les coups ne faiblirent pas du tout, je me remis à agir. Je venais de décider d'attendre de voir ce que je ferais ce truc ignoble. Il y a bien un moment où il finirait par se lasser. En attendant, j'allais me préparer un sac de trucs essentiels.

Je me débattis comme un diable, mais tout seul à m'agiter dans le vide. Putain j'étais terrorisé. Je me cachais la tête avec les bras, appuyé contre un coin de mur, comme un gosse battu.
La chose tambourinait à la porte. Si celle de l'entrée avait cédé, celle-ci ne tarderait pas non plus. Je me ruais sur le plan de travail pour récupérer mon démonte-pneus et mes couteaux. Trop chargé, ne sachant que faire de me troisième arme de fortune, je glissais le plus petit couteau dans ma chaussette.
Je me dis à raison qu'il n'était pas la peine de préparer quoi que ce soit d'autre à emporter pour le moment... La seule sortie me faisait face et un monstre m'y attendait de l'autre côté. D'abord, le buter. Ensuite, m'organiser.
Bordel, mais je n'étais pas un tueur! Je ne savais pas comment m'y attendre. C'est bien beau de voir des films et de jouer au gangsta dans la rue mais putain je n'étais qu'un pauvre joueur de basket moi.. Pire, je n'étais même qu'un livreur à ce moment-là...
C'était aps le moment de ressasser tout ça. J'avais beaucoup mieux à faire.